Policière tuée en devoir: le suspect avait déjà attaqué une psychiatre

Isaac Brouillard Lessard a été abattu lundi soir, après qu'il aurait poignardé une policière au cou. Elle a succombé à ses blessures.

Le maire de Louiseville Yvon Deshaies croit que le meurtre d’une policière en devoir lundi soir aurait pu être évité si le suspect avait reçu les soins dont il avait besoin. L’homme avait par ailleurs été déclaré non criminellement responsable dans le passé, notamment après avoir commis des voies de fait à l’endroit de la psychiatre Marie-Frédérique Allard, en plus de l’avoir menacée de mort.


« S’il avait été dans une institution, il n’y en aurait pas eu de meurtre », laisse tomber sèchement le maire de Louiseville Yvon Deshaies.

Il considère que le drame de lundi soir, au coin de la rue Saint-Aimé et de l’avenue Saint-Laurent, aurait dû être évité.

« La seule chose que je peux dire, c’est que cet homme-là a passé à travers le filet. »

Isaac Brouillard Lessard, 35 ans, aurait poignardé au cou la policière Maureen Breau. Elle avait vingt ans d’expérience et était venue l’arrêter pour une affaire de menaces. Les policiers ont ensuite fait feu sur lui et l’ont atteint mortellement.

Des policiers ont passé la journée de mardi sur le terrain, à protéger la scène et tenter de faire la lumière sur les événements. (Stéphan Lessard)

Mardi, de grandes taches de sang sur l’asphalte, en bas d’un escalier extérieur d’une vingtaine de marches, témoignaient de la violence dans laquelle la policière a perdu la vie.

« On banalise souvent l’attaque à l’arme blanche. L’arme blanche ne pardonne pas. Dans ce cas-ci, le coup a été porté au cou. Évidemment, la carotide n’est jamais loin. Ça a été un coup fatal », a mentionné le président de l’Association des policières et policiers provinciaux du Québec, Jacques Painchaud.

Le maire Deshaies avait pour sa part déjà eu affaire à la policière Breau quand il avait érigé un petite barricade sur la voie ferrée de Louiseville en 2020, pour demander une intervention visant à défaire les barricades installées sur la voie ferrée dans différentes régions du Canada. Elle lui avait alors demandé de déplacer ses choses, ce à quoi il avait répondu « arrêtez-moi » en tendant les poings. Il ne la connaissait pas personnellement, mais dit l’avoir trouvée bien gentille.

Le maire de Louiseville Yvon Deshaies tend les poings à Maureen Breau en lui disant "Arrêtez-moi", en 2020.

Attaque contre une psychiatre

Isaac Brouillard Lessard était toujours sous probation quand il aurait attaqué la policière. Il avait bénéficié d’une absolution conditionnelle en avril 2022 au palais de justice de Trois-Rivières dans une affaire de voies de fait, mais il devait se soumettre à une probation de deux ans et réaliser 200 heures de travaux communautaires.

Quatre ans plus tôt, en juillet 2018, il avait été déclaré non criminellement responsable de voies de fait et de menaces de mort à l’endroit de la psychiatre Marie-Frédérique Allard, des événements survenus à deux reprises en mai 2018. Lors de l’un d’eux, il s’était servi d’un bureau comme arme pour commettre les voies de fait.

La cour avait également statué en mars 2014 qu’il ne pouvait pas être tenu responsable de ses gestes, dans une affaire de harcèlement.

La psychiatre Marie-Frédérique Allard a été victime d'Isaac Brouillard Lessard en 2018, et il a été déclaré non criminellement responsable.

Consternés

Les résidents de l’immeuble que Le Nouvelliste a rencontrés n’ont pas souhaité être nommés ni cités directement, mais le stress était palpable, à l’hôtel le Normandie, où six d’entre eux ont été relogés temporairement par la Croix-Rouge.

Certains n’avaient pas fermé l’oeil de la nuit, profondément troublés par les coups de feu entendus. Un d’entre eux a vu la policière être poignardée et d’autres ont mis les pieds dans du sang au sol au point d’en salir leurs souliers.

Ils ont dépeint un suspect bruyant, dans un immeuble pas toujours reposant. Il y aurait d’ailleurs eu une intervention policière pas plus tard que jeudi de la semaine dernière, selon une voisine.

Des passants ont aussi mentionné qu’il y avait souvent « de la chicane » dans cet immeuble et que le drame de lundi était plus ou moins surprenant.

Des policiers ont été sur place tout la journée de mardi, pour protéger la scène et tenter d'éclaircir les circonstances entourant les événements.

Enquêtes

Deux enquêtes se déroulent maintenant parallèlement dans cette affaire. Le Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) tente d’établir les circonstances entourant le décès de la policière. Le Bureau des enquêtes indépendantes (BEI) pour sa part, tente d’éclaircir les circonstances dans lequel le civil a été abattu.

Cinq enquêteurs du BEI ont été affectés au dossier.

« Le BEI recueille des témoignages, des faits permettant de reconstituer les éléments dans les moindres détails », résume la superviseure Mélissa Amélie Plourde.